Nombreuses sont les marques qui déploient des efforts incontestables pour toucher, séduire et marquer l’esprit des consommateurs, en leur mettant des paillettes pleins les yeux. Des concepts originaux, des idées de campagnes marketing innovantes et des collaborations ou partenariats avec des stars et des vedettes exceptionnelles. On peut dire qu’en terme d’innovation et de créativité on est servi. Tout est réfléchi, pensé et mis en place de manière à conquérir le client et le faire immerger dans l’univers de la marque. Par ailleurs, des millions d’euros sont dépensés pour ces campagnes insensées, et si ces marques peuvent aujourd’hui se permettre ces budgets colossaux, c’est qu’elles ont réussi à réduire leurs coûts de production et profiter d’une main d’œuvre innocente, faible et sans pouvoir. Mais les droits de l’homme ne sont pas à vendre !
Nike, H&M, Apple, Xiaomi sont toutes des marques internationales parmi 80 autres à faire travailler des ouïgours dans des usines chinoises en mode esclavage et travail forcé, une ambiance de camp de concentration dite encore « camps de rééducation »…
Tandis que de nouveaux documents accusant la Chine d’avoir utilisé des actes de mauvais traitements contre la minorité musulmane chinoise sont apparus, nous allons évoquer deux grandes entreprises qui à côté de la réussite de leur campagne de marque se cachent la misère d’une communauté qui a tant souffert et qui de jour en jour se retrouve privée de ses propres droits à la vie.
Dans la liste des marques accusées de tirer profit du travail forcé ouïghour, on retrouve Nike et Xiaomi. Les deux marques figurent parmi les noms pointés du doigt par le représentant européen engagé Raphaël Glucksmann, ce militant qui, depuis plusieurs années, s’engage en faveur de marques soupçonnées de s’approvisionner en coton et en matières premières dans la région du Xinjiang territoire qui serait utiliser à des fins d’exploitation de la communauté Ouïghours, soient sanctionnées. Actuellement en France, deux campagnes marketing ont soulevé la colère des associations qui défendent les droits des Ouïghours, notamment celle de Nike et du Comité Miss France.
Nike : le sport pour tous, Colin Kaepernick et les Hijabeuses
Le compte Instagram de Nike Paris, dédié notamment à ses activités du swoosh dans la capitale, a multiplié de façon exponentielle la médiatisation des activations mises en place pour célébrer son 50ème anniversaire. On retrouve parmi les activités proposées, un dialogue d’échange entre le footballeur américain et activiste Colin Kaepernick, et le collectif français des Hijabeuses qui s’engage pour le port du voile dans les compétitions de football. Depuis plusieurs années maintenant, ces athlètes professionnels se battent pour pouvoir jouer au football. Car si La FIFA a autorisé le port du voile sur les terrains de football depuis 2014, il est néanmoins toujours interdit, pour les femmes voilées, de jouer lors des matchs de compétition officielle en France, selon la décision du gouvernement français. En janvier 2021 les sénateurs s’étaient positionnés contre le port du voile dans les compétitions, dans tous les sports confondus.
Si depuis 2020 Nike a toujours nié avoir bénéficié du travail forcé des Ouïghours et fustigé dans un communiqué qu’il n’achète plus de coton du Xinjiang, la virgule est toujours dans le radar de certaines associations. En février 2021, l’Association française des Ouïghours est allée jusqu’à porter plainte contre l’entreprise américaine en France. Celle-ci a accusé la société américaine de « complicité de travail forcé et de pratiques commerciales trompeuses ». Rapidement, on remarqua, l’hashtag #FreeUyghurs qui a envahi les commentaires sous un post commun entre Nike Paris et Les Hijabeuses à la suite du partage de cette rencontre inédite entre les deux parties. En 2020, Nike avait déclaré travailler en étroite collaboration avec ses fournisseurs, associations industrielles, marques et autres parties prenantes pour pouvoir piloter des méthodes de traçabilité et cartographier les origines des matériaux afin qu’ils puissent être sûrs que les matériaux de leurs produits sont produits de manière responsable. Pendant la même année le New York Times révélait que Nike et Apple avaient fait pression sur le Congrès américain pour entériner un projet de loi visant à sanctionner les marques qui se sourceraient dans la région du Xinjiang.
Miss France ambassadrice officielle de Xiaomi
Pour certains, il s’agit d’un concours de beauté sexiste, pour d’autres il signifie un simple symbole de beauté et d’élégance, et pour cette année l’élection de Miss France a couronné Diane Leyre. Quelques mois après son intronisation, la jeune femme a été sollicitée par la marque de téléphones portables chinoise Xiaomi afin de promouvoir son produit, le nouveau smartphone Xiaomi12. Le géant chinois n’a pas échappé au mur de la honte et a été lui également accusé de bénéficier du travail forcé des Ouïghours. Ce qui n’a pas manqué de faire réagir et de soulever la colère de nombreux internautes qui ont accusé Miss France de faire la promotion d’une marque peu éthique. “Vous êtes l’égérie d’une marque contribuant à l’esclavagisme des Ouïgours alors que vous pourriez être porte-parole contre”, un commentaire parmi tant d’autres sur la publication Instagram de Miss France, annonçant son partenariat avec la marque Xiaomi. Face à cet engouement, les commentaires ont depuis été bloqués par la jeune Miss France. Par ailleurs, Xiaomi s’est engagée à donner 500 smartphones à Emmaüs Connect afin d’apporter son aide aux personnes en situation de précarité sociale et numérique. Sur Instagram et Twitter, la présidente de l’Institut Ouïghours d’Europe, avait demandé à la Miss d’arrêter et de mettre fin à la promotion d’une “marque complice de la déportation” et de “la torture de millions d’êtres humains“. Celle-ci l’avait invité à agir solidairement et à rejoindre Antoine Griezmann qui avait rompu son contrat avec le géant Huawei en 2020, accusée de participer à la surveillance des Ouïghours.
Face à ces accusations, les marques se retrouvent dans une situation critique et à devoir parfois gérer des communications de crises complexes sur des sujets sensibles quant à la société, les droits de l’homme ou encore à l’environnement. La plupart choisissent de garder le silence et laisser le temps emporter la colère des individus dans l’oubli. D’autres essayent de mener des actions solidaires parfois ridicules ou de porter des discours qu’ils ne peuvent généralement pas assumer sur le long terme, car cela risquerait de lui coûter des millions d’euros. Mais ces marques internationales n’ont-elles pas de meilleures réponses ?
L’esclavage moderne jusqu’à quand ?