La crise climatique impose une réduction drastique des émissions carbone. Face à cet enjeu, de nombreuses entreprises et gouvernements ont recours à la compensation carbone pour tenter d’atteindre une neutralité. Ce mécanisme repose sur l’achat de crédits carbone, permettant aux pollueurs de compenser leurs émissions en finançant des projets censés capturer ou réduire le dioxyde de carbone dans l’atmosphère.
Cependant, cette stratégie cache une réalité bien plus sombre. Le marché du carbone, souvent opaque, profite avant tout aux grandes entreprises. Les quotas d’émission, censés limiter les rejets de CO₂, restent inefficaces. Loin d’être une solution durable, ce système accentue l’exploitation des ressources et des populations locales.
Les émissions carbone et la promesse trompeuse de la compensation
Le principe de la compensation carbone repose sur un échange simple : lorsqu’une entreprise ne peut pas réduire directement les émissions carbone, elle achète des crédits carbone. Ces crédits sont censés compenser son impact en finançant des projets de reforestation, de conservation des forêts ou de développement des énergies renouvelables.
Cependant, ce système est loin d’être efficace. Plutôt que d’encourager une vraie diminution des émissions carbone, il permet aux pollueurs de continuer leurs activités tout en prétendant être engagés pour l’environnement.
En théorie, les entreprises doivent respecter des quotas d’émission fixés par les régulateurs. Mais en pratique, elles peuvent contourner ces restrictions en investissant dans des crédits carbone peu coûteux, souvent issus de projets discutables
Les émissions carbone et l’exploitation des populations locales
L’un des aspects les plus préoccupants du marché des crédits carbone est son impact sur les populations locales. De nombreux projets de compensation carbone entreprise sont mis en place sans réelle consultation des habitants, créant ainsi des conflits et une insécurité foncière.
En Afrique, en Amérique latine et en Asie, des communautés entières ont été privées de leurs terres pour permettre à des entreprises occidentales de compenser les émissions carbone. Ce phénomène, souvent appelé “accaparement vert”, prive les populations locales de leurs moyens de subsistance, les plongeant dans la pauvreté.
L’exemple du projet Kasigau Corridor REDD+ au Kenya
Le projet Kasigau Corridor REDD+ est souvent cité comme un modèle de succès. Développé par Wildlife Works, il a permis de vendre des crédits carbone à des multinationales comme Audi, Netflix ou Kering.
Cependant, une enquête a révélé que ce projet est entaché de violations graves des droits humains :
- Exploitation des travailleurs locaux, contraints à des conditions de travail précaires.
- Violences sexuelles et abus systématiques sur les femmes employées ou vivant à proximité du projet.
- Absence de véritables bénéfices pour les communautés locales, malgré les promesses affichées.
Cette affaire montre à quel point le marché des crédits carbone peut masquer des injustices profondes sous couvert de développement durable.

L’inefficacité des quotas d’émission face aux émissions carbone
Les quotas sont censés limiter les émissions carbone qu’une entreprise peut émettre. Mais ce système est inefficace pour plusieurs raisons :
- Les quotas d’émission attribués sont souvent trop élevés, laissant aux entreprises une marge de manœuvre confortable.
- Plutôt que de réduire leurs émissions carbone, les entreprises préfèrent contourner les restrictions en achetant des crédits carbone à bas coût.
- Le prix des crédits carbone est souvent trop faible pour inciter réellement les industries à revoir leurs pratiques.
En conséquence, les émissions de CO₂ continuent d’augmenter malgré les engagements climatiques affichés par les multinationales.
Pourquoi réduire directement les émissions carbone est la seule solution viable
Plutôt que de se reposer sur la compensation carbone entreprise, les entreprises doivent s’engager à réduire directement leurs émissions carbone. Cela passe par :
- L’investissement dans les énergies renouvelables pour remplacer les combustibles fossiles.
- L’amélioration de l’efficacité énergétique des processus industriels.
- Le développement de nouvelles technologies bas-carbone pour produire sans polluer.
Les gouvernements doivent également renforcer la régulation du marché du carbone :
- Imposer des quotas d’émission plus stricts et progressifs.
- Assurer une meilleure transparence des projets de compensation carbone.
- Protéger les droits des populations locales affectées par ces programmes
Impliquer les communautés locales dans la transition
- Assurer une redistribution équitable des bénéfices issus des crédits carbone.
- Consulter les communautés avant tout projet REDD+ et garantir leur droit à la terre.
- Promouvoir des alternatives locales pour lutter contre la déforestation sans priver les habitants de leurs ressources.
Vers une réforme du marché des crédits carbone pour limiter les émissions carbone
Si le marché des crédits carbone devait perdurer, il devrait être profondément réformé. Il est essentiel d’interdire l’achat de crédits carbone issus de projets qui portent atteinte aux droits des populations locales et de garantir que chaque crédit reflète une réelle réduction des émissions carbone.
Sans ces réformes, le système actuel ne fera que perpétuer un modèle injuste où les grandes entreprises s’enrichissent en exploitant l’asymétrie d’information avec les communautés locales
Un modèle à repenser
Le marché des crédits carbone ne permet pas de réduire efficacement les émissions carbone. Au contraire, il encourage les entreprises à maintenir leurs pratiques polluantes en leur offrant un moyen de les compenser à moindre coût. Pendant ce temps, les populations locales, qui devraient être protégées, sont les premières victimes de ce modèle.
La seule solution viable est de concentrer les efforts sur une réelle diminution des émissions carbone, en régulant strictement le marché et en impliquant les communautés locales dans la transition écologique. Sans cela, la compensation carbone restera une illusion dangereuse qui aggrave les injustices environnementales et sociales.

👉 À lire aussi 👈